30/05/2023
Zoom sur le chantier d’insertion
Le chantier d’insertion, vous connaissez ? A l’occasion des portes ouvertes du chantier d’insertion, le 10 mai dernier, nous avons rencontré Caroline Maupas, accompagnatrice socio-professionnelle et responsable du chantier d’insertion de l’Intercom Bernay Terres de Normandie, qui nous a parlé de son métier et de ses équipes.
Qu’est-ce que le chantier d’insertion ?
Le chantier d’insertion est porté par le Centre Intercommunal de l’Intercom Bernay Terres de Normandie. Il a vocation à permettre à des personnes éloignées de l’emploi de reprendre un rythme et des habitudes de travail dans un environnement rassurant, pour ensuite pouvoir retrouver un emploi en milieu ordinaire, dans le domaine qu’ils souhaitent, tout en levant leurs freins sociaux. Pour fonctionner, le chantier d’insertion bénéficie de conventionnements et de subventions avec le Conseil Départemental de l’Eure, la DEETS (Direction de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités) et le Fonds Social Européen.
Pouvez-vous vous présenter et présenter l’équipe d’encadrement ? Quel est votre rôle ?
Pour ma part, je suis arrivée dans la collectivité en juillet 2019. Auparavant, j’ai réalisé mes études dans le domaine de l’Economie Sociale et Familiale, puis j’ai travaillé 4 ans pour un chantier d’insertion porté par une association nationale.
David Letailleur est l’encadrant technique du chantier. Il est présent dans l’équipe du chantier d’insertion depuis un peu plus de 10 ans maintenant. Sonny Lecalier et Mickaël Trocquet sont venus agrandir l’équipe durant l’été 2022, sur les postes d’assistants techniques. La particularité de ces 3 encadrant et assistants est qu’ils ont chacun eu un parcours en chantier d’insertion auparavant : ils savent donc très bien quelles sont les attentes des personnes qu’ils encadrent aujourd’hui.
Nous accueillons 12 salariés en insertion sur le site de Brionne, et depuis le 1er août 2022, 6 supplémentaires sur le site de Bernay.
Comment le chantier d’insertion fonctionne-t-il ?
Les salariés en insertion sont orientés par des référents sociaux (conseiller Pôle Emploi ou référent RSA) puis reçus en entretien individuel. Des Contrats à Durée Déterminée d’Insertion (CDDI) de 4 mois, renouvelables dans la limite de 2 ans à temps partiel (26 heures hebdomadaire) leur sont proposés. Durant la période de contrat, l’équipe encadrante fixe avec chacun d’entre eux des objectifs individuels en fonction de leurs besoins. Par exemple, développer ou apprendre le métier d’agent d’entretien des espaces verts, travailler les savoirs être (arriver à l’heure, prévenir en cas d’absence, porter les équipements de protection individuelle, respecter des consignes…), retrouver un logement, apprendre gérer son budget, mettre en place une demande de mutuelle, réaliser des soins, mettre en place une demande de reconnaissance de travailleur handicapé (RQTH), travailler un projet professionnel, mettre à jour ses CV et lettre et motivation….
Pour se faire, le salarié en insertion et l’accompagnatrice socio-professionnelle se voient à raison d’un voire deux rendez-vous individuels par mois. En parallèle, l’encadrant et les assistants techniques forment les salariés aux métiers d’entretien des espaces verts (techniques de tonte, de débroussaillage, de taille de haie, d’élagage…) et les impliquent dans chaque projet qui nous est confié en termes d’aménagement.
Pour ne citer que quelques exemples, le chantier d’insertion a en charge l’entretien courant de la Résidence autonomie Serge Desson (à Beaumont-le-Roger), du CCRIL (à la Trinité-de-Réville), des stations d’épuration du territoire (12 à ce jour, bientôt la totalité), de la maison de l’enfance (à Beaumont-le-Roger), des chemins de randonnée… Le chantier peut également intervenir auprès des communes qui le souhaitent, sous forme de prestations pour de l’entretien ou des aménagements : par exemple, la création d’un puit décoratif à Aclou, le nettoyage de la mare de Saint-Victor-d’Epine, l’aménagement du parc derrière la mairie de Saint-Paul-de-Fourques… Il peut également y avoir une valorisation des savoir-faire de chacun des agents, par exemple en fabriquant des décorations de fin d’année (cerf, couronnes, bonhommes de neige…), en les encourageant à réaliser les réparations sur les engins (pour ceux souhaitant travailler dans le domaine de la mécanique). Enfin, le chantier d’insertion comporte également un poste au sein de la serre pédagogique. Un agent est désigné référent de la serre et il est en charge de la production de plants annuels pour distribuer chaque année aux communes et fleurir les sites de l’Intercom (offices du tourisme, accueils, accueils de loisirs, piscine, résidence autonomie…). A ce jour, cette production est faite au printemps.
Quel est le public du chantier d’insertion ?
Ce sont toutes les personnes qui sont bénéficiaires de minima sociaux comme le RSA, l’ASS ou l’ARE mais aussi les jeunes, les séniors, les personnes sans ressources ou ayant une RQTH peuvent déposer leur candidature sur la plateforme de l’inclusion avec l’aide de leur référent social.
Quelles sont les missions du chantier d’insertion ?
La mission première du chantier d’insertion est le retour à l’emploi des salariés. Cela se déroule en plusieurs phases :
- l’entretien de recrutement : tous les candidats sans exception sont rencontrés par l’accompagnatrice socio-professionnelle (ASP) et un des encadrant. Comme dans tout entretien, leur parcours professionnel est abordé. Sont également abordés leur projet professionnel (qu’il soit en lien ou pas avec l’activité des espaces verts) et leurs problématiques sociales (logement, budget, logement, famille, justice, santé, addictions…), le tout sans aucun tabou et avec bienveillance pour leur permettre de se sentir à l’aise
- l’intégration : lors des premières semaines du contrat, les encadrants forment les nouveaux arrivants aux différentes missions, en prenant le temps nécessaire pour chacun, certains ayant déjà une expérience des espaces verts, d’autres pas du tout. Au 12ème jour au plus tard un bilan de la période d’essai est fait avec les encadrants, l’accompagnatrice socio-professionnelle et le salarié. Ce bilan permet de faire un point sur l’intégration dans l’équipe et dans les fonctions.
- le bilan du premier mois : à un mois de présence environ chaque salarié est vu pour la première fois en individuel par l’ASP. Cet entretien est un moment charnière de son parcours car il permet de faire un lien entre son passé et son avenir. Concrètement, des objectifs sont fixés conjointement pour la durée du contrat (4 mois). Ces objectifs peuvent être de l’ordre du social (faire ses déclarations CAF et Pôle Emploi seul, faire une demande de logement, mettre en place une mutuelle, réaliser des soins, s’inscrire au permis de conduire, organiser la garde des enfants…) ou du professionnel (découvrir un métier, réaliser un stage en entreprise, mettre à jour ses CV et lettre de motivation, démarcher des entreprises, participer à un forum emploi, trouver une formation qualifiante…)
- le suivi : tout au long du contrat les salariés en insertion sont encadrés sur le terrain par l’encadrant et/ou les assistants afin de les faire progresser et de mettre en valeur leur compétences et leurs savoirs être. Ils sont aussi reçus en entretien individuel par l’accompagnatrice socio professionnelle pour faire avancer leur projet. A la fin de chaque entretien, des objectifs sont fixés pour la prochaine rencontre. Des actions collectives pour la totalité de l’équipe peuvent aussi être proposés : présentation de métiers, portes ouvertes de centres de formation, forum emploi, atelier de prévention…
- le bilan du contrat : à chaque fin de contrat l’équipe encadrante se réunit (encadrant, assistant et accompagnatrice socio-professionnelle) pour faire le point sur l’avancement des objectifs fixés et du comportement sur le terrain (maîtrise des machines, respect des consignes, des horaires, du matériel, volonté d’apprendre…). Si ces deux éléments sont positifs et qu’aucun emploi ou entrée en formation n’est programmée prochainement, le contrat est renouvelé pour 1 à 6 mois en fonction des situations. Si l’un des deux éléments pose question, alors il y a discussion jusqu’à ce qu’un accord soit trouvé, et souvent un renouvellement est proposé avec un « contrat alerte » de deux mois et des objectifs imposés. Si aucun des deux n’est satisfaisant le contrat n’est pas renouvelé. Si une personne sort d’un chantier d’insertion, elle ne peut pas aller dans un autre chantier d’insertion et Pôle Emploi est alerté. Chaque personne a le droit de réaliser 24 mois sur une structure d’insertion durant toute sa vie professionnelle et non pas par structure.
- la sortie : une fois le projet professionnel identifié et validé (par un stage ou un contrat avec une autre entreprise), les salariés en insertion peuvent démissionner sans préavis. Il est aussi possible que l’équipe encadrante décide d’une fin de contrat pour une entrée en formation ou parce qu’elle a jugé que le chantier d’insertion n’avait plus rien à apporter (freins sociaux levés et projet professionnel validé).
Quels sont les partenaires du chantier d’insertion ?
Pour réussir à bien ces missions l’équipe du chantier travaille avec de nombreux partenaires : par exemple le Département de l’Eure (les CMS), Pôle Emploi, les centre de formation (AFPA, Greta, Education et formation, CEREF BTP…), les associations (Déclic, Troc Brionnais, Epicerie solidaire, Accès…) la Mission locale, CAP emploi, le CMP de Bernay, les autres chantiers d’insertion (La Ressourcerie, Terre de Champeaux, les Petites L’Ouche et La Fringue Halle) et bien d’autres.
Un dernier mot ?
Attention aux préjugés ! L’insertion est souvent perçue comme accueillant uniquement des « personnes à problèmes ». Pour faire ce métier depuis maintenant 8 ans je peux vous assurer que ce n’est pas représentatif de la réalité. Les personnes que j’ai pu accompagner cherchent simplement une main tendue, une oreille attentive pour leur redonner une chance et reprendre confiance en elles. Nous ne les assistons pas car ils sont seuls maîtres de leur destin et de leur projets. Nous les encourageons à chaque étape et les voyons peu à peu reprendre confiance en eux pour au final atteindre leurs objectifs avec fierté. En bref, personne n’est aujourd’hui à l’abri d’avoir un jour besoin de passer par un chantier d’insertion (licenciement, problèmes de santé, décès d’un proche, accident de la vie… : les raisons sont multiples) et de ce fait l’équipe encadrante et moi-même nous battons chaque jour pour déconstruire cette image négative de l’insertion et au contraire promouvoir le parcours et la réussite de chacune des personnes qui a su rebondir et sortir plus forte des épreuves de la vie. Si ce mot vous a atteint et parle à certains d’entre vous alors nous pouvons dire que c’est un pas vers l’accomplissement de cette mission.